La démarche de Marc Pallain

Durant ces dernières années Marc Pallain développe un regard et une approche originale sur les images, et l'art qu'il nous donne à voir au travers de travaux artistiques. Ces travaux sont basés sur le montage sériel de photographies abstraites réalisées au cours de nombreux déplacements.  

La photographie numérique lui permet dès 2000 d'approfondir son travail sur les images et l’espace, travail et questionnement précédemment amorcés à travers ses recherches, son enseignement et ses réalisations audiovisuelles dans les années 70 et 80.

Le numérique constitue pour lui un moyen de recueil de substrats tirés des espaces urbains ou naturels. Cette production devient alors la matière première de compositions dynamiques qui déplacent le regard du spectateur.   

C'est dans le vaste réservoir de figures que constituent les traces des hommes dans les villes, ou encore celles du temps, présentes dans la nature, les lignes, les textures, les fragments que Marc Pallain puise son inspiration. Ces traces lui permettent par des jeux de mouvement, de déplacement de faire émerger des formes et des géométries sous-jacentes. Les compositions de Marc Pallain animent, humanisent, rendent visibles des signes  éparpillés dans les espaces inhumains des activités du monde contemporain ou dissimulés dans l’usure du temps et qui sans lui resteraient cachés à notre regard. 

Sa recherche nous ouvre à un autre regard sur les choses et les objets au-delà des apparences premières. Ses travaux sont des témoignages des traces de la vie auxquelles nous ne sommes plus habitués à prêter attention, mais en prenant le temps de regarder, Marc Pallain nous livre une émotion, une sensibilité qui nous rapproche de la terre-mère ; mais pas seulement, c’est aussi un renvoi à notre condition humaine intimement liée au temps qui passe et passé.

Cet artiste refuse de voir les choses uniquement par rapport à leur fonctionnalité, il propose de revenir à leur histoire qui est par nature liée à la nôtre, à nos civilisations et au progrès. Il fait hommage aux mains travailleuses, à la sueur et au cœur des hommes qui ont bâti ces environnements. Son acuité attentive et sensible est capable de faire émerger certains accidents existants dans ces assemblages et ainsi, nous démontre que les éléments urbains, industriels créés en série sont uniques, cette unicité étant gagnée par leur utilisation et l’usure du temps.

La démarche abstractive de cet artiste lui permet de faire du beau afin de nous interpeler et nous inviter à reconsidérer notre entourage quotidien avec tendresse, attention et respect pour les bâtisseurs.

Ces montages, ces mises en séries, ces collages lui permettent d’approfondir sa  réflexion et son approche sur le rapport entre les géométries modernes qui, à partir du 19ième siècle, rompent avec la géométrie euclidienne et l’évolution de la peinture.

Faire apparaître les trames enfouies dans les trajets et le travail des hommes, faire émerger l’intelligence des courbes du temps, les géométries de la vie,  la fractalité de la matière intime,  celle qui n’est qu’onde et énergie, celle qui nous crée, nous ronge et nous anéantit.

Voilà les thèmes qui sont présents et récurrents dans le travail de cet artiste qui nous oblige par son regard à la fois tendre et attentif, à voir plus loin et plus en avant notre environnement proche.

Hélène Lucien